La Cour Administrative d’Appel de Versailles vient de rendre une décision relativement à la qualité de marchand de biens des personnes morales qui, indépendamment de leur forme juridique développent une activité de nature commerciale.
Aux termes de l’article 35-I-1° du Code général des impôts présentent le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l’application de l’impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés.
Pour l’application de cet article, trois conditions doivent être simultanément remplies :
- les opérations doivent être habituelles et les achats ou les souscriptions doivent avoir été effectués avec l’intention de revendre ;
- elles doivent consister en achats (ou souscriptions) suivis de ventes ;
- et porter sur les biens limitativement énumérés à cet article : immeubles, fonds de commerce, actions ou parts de sociétés immobilières.
Lorsqu’il s’agit d’une société, le caractère habituel des opérations et l’intention de revendre sont, le plus souvent, révélés par la définition de l’objet social donnée par les statuts. Si les circonstances de fait sont également à prendre en considération, les dispositions du pacte social ont une importance primordiale et c’est seulement dans l’hypothèse où l’activité réelle de l’entreprise ne correspond pas aux statuts que la présomption résultant de ces derniers doit être écartée.
Les faits sont les suivants. A l’issue d’une opération de contrôle sur place de la SCI C, M. A gérant majoritaire, a été assujetti à des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu au titre des années 2009 et 2010, à raison de la réintégration dans ses revenus fonciers de 83,3 % du bénéfice rectifié de cette société, correspondant à la quote-part des parts sociales qu’il y détient.
M. A a demandé au Tribunal administratif (TA) de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010 ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement du 17 mai 2017, le TA de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
M. A fait appel du jugement du TA de Cergy-Pontoise en faisant valoir que l’imposition en litige méconnaît les dispositions du 2 de l’article 206, de l’article 239 ter ainsi que de l’article 1655 ter du CGI dès lors que, compte tenu de son objet social, la SCI C ne pouvait être qu’assujettie de plein droit à l’impôt sur les sociétés, et ses résultats ne pouvaient faire l’objet d’une imposition entre les mains de ses associés dans la catégorie des revenus fonciers.
La Cour rappelle qu’aux termes de l’article 8 du CGI sont notamment personnellement soumis à l’impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société, les membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l’une des formes de sociétés visées au 1 de l’article 206 du même code et qui, sous réserve des exceptions prévues à l’article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 du même code.
Au cas particulier la Cour fait valoir que « quand bien même son objet social l’autoriserait à exercer une activité commerciale » la SCI C, exerce de manière habituelle une activité à caractère civil de location de locaux nus.
Selon la Cour, « la vente par cette société de deux locaux, l’un en 2006 et l’autre en 2011, ne saurait suffire à la faire regarder comme développant une activité de marchand de biens de nature commerciale dès lors qu’il n’est pas contesté que les deux locaux concernés n’ont pas été acquis en vue de leur revente. »
Par suite, la Cour estime que la SCI C « qui ne se livre pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 du CGI, notamment à l’achat en vue de leur revente, de manière habituelle, d’immeubles, et qui n’a pas souscrit d’option en vue d’être assujettie à l’impôt sur les sociétés, n’est pas soumise de plein droit à l’impôt sur les sociétés en application des dispositions du 2 de l’article 206 du code général des impôts aux termes desquelles, sous réserve des dispositions de l’article 239 ter, les sociétés civiles sont passibles de l’impôt sur les sociétés, même lorsqu’elles ne revêtent pas l’une des formes visées au 1, si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35. »
Enfin, la circonstance que la SCI C ne constituerait pas une société transparente au sens des dispositions des articles 239 ter ou 1655 ter du CGI n’est pas davantage de nature à fonder son assujettissement de plein droit à l’impôt sur les sociétés dès lors qu’elle exerce une activité civile et non une activité commerciale.
Arrêt de la CAA de VERSAILLES, 3ème chambre, 25 juillet 2019, n°17VE02293